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Nantes, le 17 février 2021

par Betty N.

Mon bébé,

Je crois dans le fond que nos passages à vide sont riches en enseignements sur nous-mêmes et nous conduisent à la rencontre avec notre moi profond. Cette introspection m’a ainsi conduite à faire des choix radicaux, mais qui m’ont apporté une sérénité si précieuse que beaucoup ont d’ailleurs remarquée. J’ai donc décidé d’arrêter ma formation d’élève-avocate, et ce faisant, en me détachant de ce fameux titre, j’ai pu me pencher sur mon désir profond : un désir de liberté. Me voici ainsi libérée des attentes (réelles ou supposées) des autres, libérée de leur regard. J’ai décidé d’être libre professionnellement parlant car je pressentais bien que le statut de collaboratrice en cabinet ne me conviendrait pas à la longue, après avoir goûté à la liberté dans le cadre de mes activités de traduction et demeurant très nostalgique de l’époque où je travaillais en famille, au cabinet de ton papi. Et depuis cette prise de décision, les sollicitations ne cessent de pleuvoir. Comme si quelque chose s’était débloqué. Mais surtout, je suis libre de passer le temps que je souhaite avec ton frère et ta sœur. Le changement est flagrant : j’ai développé une grande complicité avec ta sœur qui ne me voyait que très peu lorsque j’étais encore élève-avocate, ce qui n’a pas échappé à tous ceux qui nous connaissent. Avec ton papa nous continuons d’avancer main dans la main, maintenant que nous travaillons ensemble, pour notre plus grand bonheur. J’ai repensé à la déception ressentie lorsque ma demande de stage en cabinet franco-allemand avait été refusée car ce cabinet ne prenait pas de stagiaires. Je sentais que m’éloigner de l’Allemagne était quelque part m’éloigner de toi, sentiment que je ressens depuis que nous avons quitté Berlin pour rentrer en France. Or c’est ce lien avec l’Allemagne, ce lien avec toi, que je retrouve dans les traductions et dans nos projets franco-allemands à venir qui me fait vibrer, qui a véritablement du sens pour moi. Le recul acquis ces derniers mois me l’a fait réaliser.

Ton frère et ta sœur nous parlent de plus en plus en allemand et avec papa nous sommes émus de les entendre faire. Nous savons qu’ils te connaissent déjà et lorsque nous leur avons parlé de toi nous l’avons compris. J’ai pu parler de toi avec deux mamans de la crèche avec lesquelles je m’entends à merveille et, pure coïncidence, non seulement elles ont toutes les deux vécu à Berlin mais l’une d’entre elle a accouché de son premier enfant à la maternité où je t’ai donné naissance un an auparavant. Avoir cette écoute attentive, te raconter, raconter l’amour que je te porte, fut un véritable moment de bonheur. Je nous ai revus à la maternité, en peau à peau, alors que je te chantais les berceuses qui t’étaient si familières. J’ai ressenti de nouveau cette vague d’amour si forte qu’on ne saurait en restituer la puissance à travers des mots.

Je me sens libre d’aimer aussi fort mon époux et nos trois enfants, libre d’enfin pouvoir adapter ma vie professionnelle en fonction d’eux et de ne pas la laisser écraser toute ma vie familiale. Libre de ne plus penser que je me dois de décrocher tous les diplômes ou titres imaginables pour prouver ma valeur à mes parents,  à la société. Libre de ne plus considérer que je me dois d’être un modèle d’exemplarité, sans faille, pour ton frère, ta sœur, et qui sais-je encore. Je me sens libre d’éprouver des moments de tristesse, d’éprouver ce manque de toi, d’appréhender le 5 et le 6 mars de chaque année et de trouver cela normal. Je me sens moi, et cela grâce à toi.

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